La suppression de l’obligation fiscale déchaine les passions et crée des tensions (voir le psychodrame patronal de la semaine dernière). Rarement les points de vue auront été autant contradictoires sur un sujet habituellement très consensuel. Qui a raison dans l’affaire ? Voici les arguments des deux camps en se plaçant en premier du point de vue des pourfendeurs de cette obligation.
L’obligation de 0,9% n’est qu’une obligation de dépenser
C’est vrai, les entreprises n’ont pas d’obligation de former à travers l’obligation du 0,9%. Elles ont le choix entre former ou payer. Et dépenser ne signifie pas forcément réaliser une formation efficace. Les défenseurs de la suppression répètent à loisir que la principale obligation en matière de formation se situe davantage dans l’obligation d’adaptation et de maintien dans l’emploi que dans l’obligation de dépense obligatoire. Reconnaissons qu’ils n’ont pas tort. Se concentrer sur les finalités plutôt que sur les moyens est toujours plus pertinent. Mais les défenseurs du 0,9% rétorquent que sans moyen, il n’y a pas de fin. Supprimer le 0,9% c’est amener les entreprises à réduire leur effort de formation, or la formation est facteur de compétitivité et de mobilité professionnelle.
La fin de l’obligation fiscale ne signifie pas la fin de la mutualisation
Il ne faut pas confondre obligation fiscale et obligation conventionnelle de versement à des fonds mutualisés. La première relève du principe de l’impôt, la deuxième de celui d’une assurance sociale. Les tenants de la suppression de l’obligation fiscale, Medef en tête, ne sont pas contre la mutualisation. Ils souhaitent surtout supprimer les lourdeurs administratives liées à l’obligation fiscale. Ceux qui défendent l’obligation fiscale estiment à juste titre que ce qui est pris n’est plus à prendre. Si on supprime l’obligation du 0,9%, les entreprises rechigneront à verser en obligation conventionnelle un montant aussi élevé qu’il ne l’était du temps de l’obligation fiscale. Rien n’est moins sûr évidemment.
L’obligation fiscale impose une stagification de l’offre de formation
La stagification est l’argument massue des pourfendeurs du 0,9%. L’obligation fiscale a conduit à l’établissement d’une définition juridique de l’action de formation qui date du milieu des années 1970. Cette définition est aujourd’hui totalement surannée. Former ce n’est pas mettre des stagiaires en groupe de 12 dans des salles de formation de 9h00 à 17h30, c’est développer les compétences par tous moyens : e-learning, social learning, apprentissage expérienciel… Les défenseurs du 0,9% ont du mal à l’entendre et cherchent actuellement à fermer davantage le marché de la formation. Ce sont en effet les mêmes qui prônent une obligation de qualification et une capitalisation en heures plus importante pour le CPF, ainsi qu’une obligation de certification pour les organismes de formation. En même temps, ils déclarent être ouverts à une révision des critères d’imputabilité.
La fin de l’obligation fiscale est le moyen de retrouver des marges pour les entreprises
Cet argument n’est prononcé par personne, mais il faudrait être dûpe pour ne pas y penser. Dans l’idée du Medef, le solde in fine ne doit pas être nul. Fin de l’obligation + augmentation de la contribution conventionnelle = un effort global de l’entreprise moins important. Le débat actuel sur le moins d’impôt ne peut être mis de côté. Ce que les entreprises ont perdu avec les augmentations de contribution retraite, elles espèrent le regagner avec la formation.
Voici donc résumés les points clés, maintenant à vous de choisir ou si vous le souhaitez d’approfondir la question via les quelques articles suivants :
Jean-Marie Luttringer : Contribution juridique au débat du devenir de l’obligation fiscale – cliquez ici.
Jacques Santelmann : la fin du 0,9%, une opportunité à saisir – cliquez ici.
Marc Ferracci : La mutualisation ne bénificie pas aux petites entreprises – cliquez ici.
Et pour retrouver tous les textes des projets d’accord, vous pouver consulter notre topic réforme formation 2014 sur Scoop it – cliquez ici.
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