Une nouvelle génération de plateformes arrive à maturité. Elles ont pour nom Openclassroom, Skillsoft ou encore Straigtherline. Véritables portails de contenu, elles réinventent l’accès à la formation. Seront-elles séduire les apprenants ? Et si oui, ne risquent-elles pas d’entraîner une ubérisation de la formation ?
La formation quand je veux, où je veux
Ces nouvelles plateformes premium bénéficient de nouvelles fonctionnalités qui permettent d’offrir de nouveaux services aux apprenants :
- Possibilité d’accéder à un accompagnement pédagogique à distance (tchat synchrone ou assynchone, forum d’apprenants, cours par téléphone ou classe virtuelle à la demande en complément…)
- Personnalisation du parcours et possibilité de valider ses acquis au terme de sa formation via quiz voire examen certifiant en partenariat avec des écoles ou universités
- Accès payant par abonnement mensuel à un très large catalogue de contenu thématique sur le principe de Netflix ou Spotify.
Bref, c’est le MOOC payant et personnalisé, disponible à tout moment, sans attendre que le cours ne démarre.
Payer pour se former : y a-t-il un marché ?
Les offres de ce type de plateformes sont pour l’instant restreintes*. Il faut dire que le modèle économique est très capitalistique. Ces plateformes nécessitent :
- Un catalogue de formation très riche et de grande qualité.
- Suffisamment de volume pour mettre en place un accompagnement synchrone et gérer les flux de demandes de services personnalisés (hotline pédagogique).
- Une fiabilité et une ergonomie logicielle irréprochable.
- Un marketing très coûteux afin de capter un maximum de clients (il s’agit d’un marché BtoC plutôt que BtoB).
Tous les investissements consentis doivent être amortis rapidement. Et pour cela il faut du volume. Mais y a-t-il un public en France prêt à dépenser de 9€90 à 99€ par mois pour se former ?
Le travailleur indépendant, les professions libérales… pourraient être au rendez-vous. Qu’en sera-t-il des salariés habitués à bénéficier de formations prises en charge par leurs entreprises ou organismes paritaires ? Et les chômeurs ? Seront-ils capables d’investir dans leur capital compétence au moment où leur budget personnel est plus contraint ?
Reste le co-financement de ces plateformes par les entreprises ou les financeurs publics. Mais une autre question se pose alors : ces abonnements peuvent-ils être financés d’un point de vue légal ? Passent-ils dans les fourches caudines des nouveaux critères qualité ? Et de la nouvelle définition de l’action de formation ? A n’en pas douter, il faudra un peu d’imagination aux financeurs pour les prendre en charge, mais après tout il est possible de mettre en place des PIF pour ce type de formation également.
Risque d’ubérisation ???
Ces nouvelles plateformes, si elles trouvent leur public, font courir un risque d’ubérisation au marché de la formation. Elles cassent les codes en matière de business model des organismes de formation. Une fois le catalogue et la plateforme déveleloppés et les clients acquis, les sources de coûts se limitent aux seules dépenses d’accompagnement pédagogique.
Et cet accompagnement pédagogique peut se faire par les autres apprenants eux-mêmes à travers des communautés d’apprentissage. On n’est pas très loin alors d’un business model de type BlaBlaCar ou AirBnB. Ou par des “téléformateurs” répondant en direct de chez eux aux questions des apprenants et les accompagnant dans leur progression pédagogique.
Ce téléformateur pourrait être à la formation, ce que le VTC est au Taxi. Il pourrait être noté par ses apprenants et travailler en free lance en bénéficiant du support commercial de la plateforme.
Ce modèle d’une formation ubérisée fait froid dans le dos. Et malheureusement les choix faits à travers le décret qualité vont dans ce sens. N’oublions pas qu’il a été décidé de labelliser les organismes et non pas de certifier les formateurs. Les plateformes pourront être facilement labellisées et les formateurs n’auront pas de licence ou de permis de former à faire valoir face aux futurs Uber de la formation !