Nous multiplions actuellement les interventions auprès de directions de formation ou d’organismes de formation sur le thème de l’innovation pédagogique. Et le sujet dérive systématiquement sur le digital learning. Est-ce vraiment efficace ? Peut-on former en 100% digital learning ? Faut-il vraiment s’y engager maintenant ou est-il préférable d’attendre ? Etc.
Ces questions ne sont pas inintéressantes et méritent d’être posées. Cependant, il paraît étonnant que des directions de formation ou d’organismes se les posent encore, 20 ans après l’introduction des premières approches de e-learning. Pour nous, l’hésitation n’est plus de mise. Le digital learning, sans être la panacée, est devenue incontournable pour les entreprises, évidemment, et encore plus pour les organismes de formation. Voici les trois arguments que nous avons l’habitude d’avancer pour stopper ces hésitations et répondre à la seule vraie question qui mérite débat : comment y aller ?
L’argument pédagogique
Le digital learning n’est pas une modalité de substitution mais de complément. Se demander si on ne peut apprendre qu’avec du digital learning revient à se demander si on ne peut rouler qu’avec un vélo électrique avant d’acheter un VAE. Le digital learning est parfait pour les savoir simples, stabilisés et pérennes. Il ne permet que plus difficilement de faire acquérir des savoirs complexes, très contextualisés et instables. Mais le présentiel et l’expérienciel sont là pour prendre le relais.
C’est la multimodalité qui est la véritable innovation pédagogique aujourd’hui. C’est la capacité à combiner au mieux les trois pédagogies primaires (présentiel/distantiel ou FOAD/expérienciel ou FEST) qui permet de bâtir des dispositifs pédagogiques réellement efficients. Plutôt que de se focaliser sur le seul digital learning, les organismes de formation et les fonctions formation feraient mieux de penser comment cette troisième modalité peut au mieux préparer et renforcer les apprentissages présentiels et comment elle peut aider les formateurs et tuteurs à exercer au mieux leurs missions.
Alors oui, le digital learning n’est pas l’alpha et omega de la formation, mais il est devenu incontournable à tout dispositif de formation efficient.
L’argument culturel
“Nos publics ne sont pas prêts pour le digital learning”, “leur appétence est faible, ils ne sont pas capables d’apprendre seuls”… ces arguments nous les attendons encore trop souvent dans le monde de la formation.
C’est vrai certains publics ont encore du mal à apprendre seul devant un module de 20 ou 30′ très dense sur le thème de la “compliance” ou de “l’entreprise 4.0”. Mais le digital learning ne se limite pas à l’autoformation en e-learning. On peut consulter à plusieurs le même module, on peut interagir dans des communautés d’apprentissages…
Halte aux vieux poncifs sur le digital learning ! Le digital learning d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec le e-learning d’hier. Une chose est sûre : si les quinquas d’aujourd’hui gardent de mauvais souvenirs de leurs premières expériences de E-learning, la génération Y, et encore davantage la Z, qui va entrer sur le marché du travail, ne comprend pas pourquoi il faudrait aller en stage pour se former.
L’argument culturel risque de ne pas tenir longtemps. La bascule se fera probablement très vite : en 3, 4 ou 5 ans ???
L’argument économique
Combien peut rapporter les investissements dans le digital learning ? Faut-il investir dans une plateforme ? Un studio de production ? La formation de mentors ?… S’interroger ainsi, c’est aborder le problème à travers une vision gestionnaire, alors qu’il faudrait le poser de façon stratégique. Le R.O.I du digital learning n’est pas évident. Investir 100 K€, 500 K€ ou 5 M€ ne vous garantit en rien d’en récupérer 200 K€, 1M€ ou 10 M€. Mais là n’est pas le problème.
Le digital learning fait partie des investissements que l’on peut appeler “défensifs”. Quand vous investissez dans une mise en conformité suite à une évolution réglementaire (le datadock, par exemple !), évaluez-vous le R.O.I ? Là, n’est pas la question évidemment. L’argent investi vous permettra seulement de pérenniser votre activité. Il en est de même pour le digital learning. Pour les organismes de formation, ne pas avoir d’offre digital learning, c’est demain disparaître. Car toute formation ou presque sera “blended” ou “hybride”. Pour une direction formation, c’est prendre le risque de se faire dépasser très vite par les directions opérationnelles qui sauront (savent) développer leurs propres solutions digitales. Ne remplissant plus leur mission première de formation, elles disparaîtront dans les années 2020 aussi vite qu’elles ont été créées dans les années 1950. Mais nous en sommes convaincus, elles sauront se transformer avant.