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Comment lutter contre la perte d’attention des apprenants ?

Si l’on en croit les questions que posent les formateurs que nous formons, la perte d’attention des apprenants semble actuellement la difficulté majeure en animation. Les apprenants auraient du mal à se concentrer, bombardés en permanence par des notifications provenant de toutes parts (mails, réseaux sociaux, messagerie instantanée, etc.) et surchargés mentalement (stress au boulot, à la maison, dans la vie personnelle, excès d’écrans, etc.).

« L’attention : mal du siècle ! » nous dit-on. Probablement, même si dans le “monde d’avant”, les formateurs étaient déjà confrontés à cette difficulté. Mais le problème semble avoir changé de nature. Quand j’ai débuté ma propre carrière de formateur (c’était avant Internet !), un confrère plus expérimenté que moi m’avait préconisé une solution simple : « Quand après le repas de midi, tu vois qu’il y en a un qui s’assoupit, tu passes derrière lui discrètement et tu tapes des mains. Tu verras, il se reconcentrera ! ». La méthode était amusante. Je l’ai testé plus d’une fois. Mais aujourd’hui, elle fonctionne beaucoup moins bien, en visio notamment !

Et puis il faut reconnaître que le problème n’est pas seulement que les apprenants s’assoupissent (il n’y a plus de vin le midi dans les restaurants d’entreprise !) mais plutôt qu’ils zappent et passent très vite à autre chose.

Alors comment faire ? 4 pistes de solutions semblent possibles aujourd’hui. Nous préconisons plutôt les deux dernières aux formateurs.

Interdire

C’est la réaction la plus naturelle. Puisque les apprenants n’arrivent pas à se concentrer, on va exiger d’eux qu’ils le fassent. Alors on interdit smartphones et ordinateurs portables pendant la formation. L’espace de formation se transforme en quelque sorte, en un “monastère moderne”. Retiré du monde informationnel, les apprenants n’ont plus d’autres sollicitations que celles du formateur et des autres apprenants. Ils sont bien obligés de se concentrer. On est revenu comme au temps d’avant internet… ou presque. Car cette technique, séduisante à première vue, n’est ni facile à mettre en oeuvre, ni sans conséquences.

  • Elle est difficile à appliquer car se priver d’internet en formation, c’est souvent se priver de sources d’information très utiles pour la formation elle-même (notamment pour des parcours multimodaux où la documentation pédagogique est digitale).
  • Et surtout, couper les apprenants pendant plusieurs heures de leurs « doudous informatiques », c’est généralement les mettre en état de stress élevé. Ils n’ont plus de notification, mais pas sûr qu’ils aient beaucoup plus de concentration.
  • Enfin, démarrer sa formation en faisant preuve d’autorité et en interdisant ces moyens de communication, dont la plupart des gens ne se séparent jamais, peut être vécu comme une conduite autoritaire forte. Et par conséquent très mal acceptée aujourd’hui.

C’est pourquoi, nous ne préconisons pas la piste de l’interdiction. Nous préférons demander à nos apprenants au démarrage de nos formations, d’utiliser le moins possible leurs “doudous technologiques”. Nous insistons sur le fait que le multitâche ne fonctionne pas (Cela a été prouvé par de nombreux résultats d’études en neurosciences). Mais nous ne les brimons pas en leur demandant d’éteindre leurs portables et smartphones !

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Gamifier

Deuxième solution, passer à la ludopédagogie. Puisqu’avec le smartphone, Homo Sapiens est devenu Homo Ludens, prenons-le à son propre jeu et jouons en formation !

C’est une stratégie radicalement opposée à la précédente. Ils veulent jouer, ils vont donc jouer mais à des jeux pédagogiques. Et les formateurs sont devenus des experts en Quiz ou Escape Games ou encore Trivial Pursuit pédagogique. Et ça « Klaxoone » et ça « Kahoote » fort en formation !

Pourquoi pas ! Mais la solution ne doit pas devenir le problème. Trop de jeu tue la formation. Les apprenants ne cherchent plus à comprendre ou à mémoriser, ils cherchent avant tout à gagner : à battre l’équipe d’en face.

Un peu de jeu permet de dynamiser certaines séquences, notamment à des heures particulièrement délicates (reprise en début d’après-midi ou dernière séquence avant la fin de journée). Mais tout gamifier n’a pas beaucoup de sens. Et ce n’est pas parce que les start-up en ludopédagogie nous disent que ça marche… Que c’est pour autant réellement efficace. Ce serait intéressant d’ailleurs d’avoir quelques résultats de travaux scientifiques sérieux (et donc comparatifs) entre « apprentissage ludique » et « apprentissage sérieux ».

Nous vous préconisons donc avec parcimonie la gamification pour favoriser la concentration. Utiliser quelques jeux de temps en temps, pour redynamiser un moment délicat pourquoi pas, mais l’excès est à éviter.

Favoriser l’interactivité

A contrario, l’interactivité en formation nous vous la préconisons quasiment sans limite. Comme le jeu, l’interactivité consiste à mobiliser l’apprenant en le sortant de la simple posture d’écoute. Mais l’interactivité va beaucoup plus loin que le jeu. Il ne s’agit pas d’inviter l’apprenant à être actif, mais à le rendre auteur de sa formation.

Comme l’a démontré si bien la professeure américaine Micheline Chi – cliquez ici pour consulter notre article sur le modèle ICAP – l’interactivité consiste à interagir avec ses pairs pour apprendre. C’est en travaillant en sous-groupes, en échangeant, en résolvant des problèmes en commun que l’on apprend le mieux. Car notre engagement cognitif est particulièrement élevé. Nous ne faisons pas seulement qu’écouter la bonne parole, mais nous la discutons, voire nous l’élaborons (par exemple, avec des techniques de type Hackhaton, World Café, formation-action, etc.).

Si vous voulez favoriser l’attention de vos apprenants, travaillez donc plus particulièrement la conception de vos formations. Imaginez des séquences pédagogiques où vos apprenants vont co-construire leurs connaissances.

Attention ! Cela ne signifie pas que vous devez supprimer tous vos exposés. Dans ce domaine aussi, le mieux est l’ennemi du bien. Mais restons vigilants : limitons les exposés à 20 ou 30’, rendons-les les plus attractifs possibles (en évitant toutes les erreurs bien connues des mauvais orateurs) et complétons-les par des séquences d’ancrage et de structuration des connaissances en petits groupes (Nous utilisons par exemple chez C-Campus des techniques telles que la FAQ ou le Quiz Starter en amont de l’exposé et « Pépites & Questions » ou le « Brainstorming pédagogique » en aval.

Découvrez notre jeu de cartes La Pédagothèque 1 avec ses 33 techniques pédagogiques interactives – cliquez ici.

S’adapter aux attentes

Quatrième et dernière piste que nous préconisons aux formateurs qui viennent suivre nos formations de formateurs :  s’adapter aux attentes de leurs apprenants.

Pour se concentrer, il faut avoir intérêt à écouter. Vous avez déjà dû faire l’expérience des dizaines de fois, en lisant un livre très pénible ou en écoutant un professeur peu enthousiasmant. Quand vous avez un intérêt supérieur à le lire ou l’écouter (certification importante en vue ou accès à un nouvel emploi beaucoup mieux rémunéré), vous vous surprenez à ne pas lâcher et à aller jusqu’au bout, même si c’est dur et pénible !

Le formateur doit garder en tête la très belle formule de Bertrand Schwartz, l’un des pères fondateurs de la formation professionnelle en France : « un adulte n’est prêt à se former que s’il peut trouver dans la formation une réponse à ses problèmes dans sa situation ». Autrement dit, cherchez ce qu’attendent de votre formation vos apprenants et adaptez-vous à leurs attentes. Faire le programme, et tout le programme n’est pas un but en soi. L’essentiel est que chacun trouve dans votre formation quelque chose qui lui servira, qui aura un lien fort avec son activité professionnelle.

Pour cette quatrième piste de solution, plusieurs techniques existent :

  • Soignez le tour de table et établissez un “contrat pédagogique” de qualité avec vos apprenants.
  • Mettez-vous à leur place pour comprendre comment ils pourront utiliser les connaissances que vous devez leur faire acquérir et aussi soignez les liens entre théorie et pratique.
  • Faites-les travailler sur des cas réels qui les concernent directement. Utilisez par exemple des techniques de « co-coaching » ou de « co-développement » où chacun est tour à tour le coach de son binôme et l’aide à trouver les solutions à ses problèmes.

En conclusion, ne cherchez pas la martingale pour lutter contre la difficulté à se concentrer de vos apprenants. Ne croyez pas qu’en étant un orateur fantastique ou en utilisant toutes les applis de ludopédagogie, ça roulera tout seul. Soyez modeste, concentrez-vous sur leurs attentes, invitez-les par des pédagogies « Interactives » ou « co-actives » et non pas seulement actives à co-construire leurs connaissances, et tout se passera bien.

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Marc Dennery

Marc Dennery

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