La formation est un métier ! N’en déplaise à ceux qui pensent que former, c’est faire quelques slides et bien causer autour, concevoir une formation ne s’improvise pas. Nous le constatons chaque année à travers les 1500 formateurs occasionnels ou permanents qui nous questionnent et nous challengent dans nos formations de formateurs. Cet article pointe les principales fausses routes qu’ils nous évoquent au cours des échanges que nous avons avec eux.
Erreur #1 – Commencer par réaliser un beau diaporama PowerPoint
Le formateur débutant est trop souvent obnubilé par le contenu qu’il a à transmettre. Son premier réflexe est donc de produire un magnifique diaporama PowerPoint. Nous n’avons rien contre le diaporama PowerPoint, mais reconnaissons que ce n’est pas le meilleur moyen de démarrer sa conception.
Une conception réussie passe d’abord par une analyse fine du profil de ses apprenants :
- Que savent-ils sur le sujet ?
- Que devront-ils faire de nouveau de retour à leur poste de travail ?
- Quel est leur niveau d’engagement à l’égard de la formation ?
Ce n’est qu’une fois cette analyse réalisée que l’on pourra établir les objectifs pédagogiques, puis pour chacun d’eux déterminer les moyens de les évaluer et définir la stratégie pédagogique et les techniques pédagogiques associées. Le diaporama sera à réaliser à la fin quand on sait avec précision ce que l’on veut faire dans sa formation et pourquoi on veut le faire (cf. ci-après Erreur #7).
Erreur #2 – Dessiner la progression pédagogique avant de concevoir les séquences
Une deuxième erreur est de vouloir déterminer la progression pédagogique dès l’identification des objectifs. Le débutant se rassure en visualisant très tôt le chemin qu’il aura à parcourir dans son animation. Mais rien ne presse ! Il est bien plus profitable de concevoir chacune des séquences séparément. On évite ainsi de se contraindre dans un « timing » d’animation. On travaille sans a priori. Seule l’efficacité pédagogique est recherchée. Une fois que toutes les séquences sont bien définies, on aura toujours le temps de les adapter en fonction de leur position dans le déroulé de la formation.
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Erreur #3 – Bâcler la rédaction des objectifs pédagogiques
Le formateur débutant préfère généralement passer une heure ou deux à soigner les animations de son diaporama qu’à rédiger avec précision ses objectifs pédagogiques. Et pourtant ! Des objectifs où le verbe d’action sont mal choisis ou le comportement observable mal définis, c’est courir le risque de rater sa séquence pédagogique.
Entre « être capable de citer » et « d’expliquer », il y a parfois des différences énormes. Et encore plus avec des verbes d’actions de niveau 3 de la taxonomie de Bloom comme « réaliser ou utiliser ».
Bien définir ses objectifs pédagogiques, c’est partir sur des bases solides. C’est aussi et surtout aller à l’essentiel. C’est le meilleur moyen de réduire la durée de sa formation sans forcément en dégrader ni la qualité, ni l’opérationnalité.
Erreur #4 – Choisir les techniques pédagogiques sans stratégie pédagogique
Le formateur débutant maîtrise généralement assez peu de techniques. Donc, il fait avec ce qu’il connaît. Et ce qu’il croit être efficace : un exposé, un jeu de rôle, un exercice d’application, un jeu. Mais là n’est pas son erreur la plus grave dans le domaine. L’erreur du débutant est surtout de ne pas s’interroger préalablement sur la question du choix de la stratégie pédagogique.
La stratégie pédagogique, c’est la façon de faire acquérir les connaissances. Elle peut être déductive (partir de la théorie pour aller à la pratique) ou inductive (inversement partir de la pratique et remonter à la théorie). Cette stratégie est à définir pour chaque séquence en fonction du profil des apprenants, leur niveau d’engagement et d’expérience. Ce n’est qu’une fois la stratégie clairement identifiée que l’on s’interrogera sur les techniques ou activités pédagogiques qui permettront de la déployer. Procéder à l’envers, c’est laisser libre cours à son intuition ou à ses manies de formateurs. Certains adorent la ludopédagogie et ne font que des jeux. D’autres sont très à l’aise dans la prise de parole et multiplient les exposés… Mais ce qui compte, c’est répondre aux besoins de l’apprenant. Que lui faut-il pour qu’il apprenne le plus efficacement possible. Ce que préfère le formateur n’a pas lieu d’être dans un processus de conception pédagogique de qualité !
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Erreur #5 – Utiliser des techniques pédagogiques et d’évaluation sans tenir compte du niveau d’objectif
Autre erreur courante avec les techniques pédagogiques, c’est l’incohérence avec le niveau d’objectif. Nombreux sont les formateurs débutants qui utilisent par exemple une technique de type exposé pour faire acquérir une pratique et qu’ils contrôlent son acquisition avec un simple quiz.
Tout l’art du concepteur est à l’inverse de parfaitement aligner les types de technique pédagogique et outils d’évaluation sur le niveau d’objectif en référence à la taxonomie de bloom. Cet « alignement pédagogique » est à contrôler systématiquement après chaque conception de séquence. Ce contrôle qualité reste le meilleur moyen pour garantir que le temps passé dans la séquence sera pleinement utile.
Erreur #6 – Penser qu’évaluer se passe uniquement à la fin
L’évaluation, dans l’imagination des débutants, est ce qui permet à la fin de sa formation de mesurer l’efficacité de sa formation. Cela n’est pas faux, mais pas tout à fait juste non plus !
L’évaluation peut être réalisée en amont (évaluation diagnostic ou prédictive) pour orienter ou valider une inscription, pendant (évaluation formative) pour détecter les écarts entre ce que l’apprenant devait apprendre et ce qu’il a concrètement appris et y remédier en adaptant son parcours de formation et enfin, au terme ou quelques temps après la formation (évaluation sommative) pour évaluer les acquis et les transferts pédagogiques. Tout ceci constitue le dispositif d’évaluation et il doit être imaginé dès les objectifs pédagogiques identifiées. Car, si on ose détourner une formule célèbre, « Dis-moi ce que tu évalues, je te dirai comment tu formes ! ».
Penser le dispositif d’évaluation dès la rédaction des objectifs pédagogiques permet :
- De valider qu’on aura bien les moyens de mesurer que les objectifs seront bien atteints et qu’ils sont donc bien rédiger.
- D’avoir les idées claires sur le cheminement de l’apprenant tout au long de sa formation : comment il y entre ? Comment on peut l’aider à personnaliser son parcours ? Comment on s’assure qu’il progresse ? Comment on reconnait cette progression à la fin ?
Réfléchir très tôt au dispositif d’évaluation c’est ainsi un très bon moyen d’imbriquer dispositif d’évaluation, dispositif de formation et dispositif d’accompagnement.
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Erreur #7 – Confondre support d’animation, livret apprenant et document formateur.
Qui trop embrasse, mal étreint ! C’est bien connu, mais pas forcément des formateurs débutants. Ils ont tendance à surcharger leurs diaporamas de formation car ils souhaitent l’utiliser tout à la fois comme support d’animation, livret à remettre à l’apprenant pour qu’ils gardent une trace de tout ce qu’il a appris et, notes personnelles du formateur (s’il oublient quelque chose, au moins la diapo leur rappellera !)
Trois objectifs pour un même objet, c’est au moins deux de trop. La meilleure façon de pratiquer est d’en faire trois versions différentes :
- Version “Support d’animation” : sur laquelle ne figurera que les diapos de schéma, d’illustration et de points en retenir pour soutenir la prise de parole du formateur, et aussi les diapos dites de « guidance pédagogique » qui permettront de guider les apprenants dans leur progression : objectifs et enjeux pédagogiques, consignes et timing pour chacune des séquences.
- Version “Note pour le formateur” : il s’agit généralement du même document mais avec des apports complémentaires indiqués dans la partie « Commentaires » du PowerPoint. Parfois, certaines diapositives sont rajoutées au cas où… Par exemple pour répondre à une question de précision des apprenants.
- Version “Livret apprenant” : c’est une version à la fois expurgée (on retire les diapos de guidance pédagogique) et enrichie (on rajoute des textes explicatifs pour faciliter la lecture hors voix off de l’animateur) du support d’animation. Cela prend un peu de temps à réaliser, mais c’est un outil pérenne qui pourra resservir à l’apprenant et aussi à ses collègues s’il le partage.