La formation à distance, la FAD (ou FOAD), de fait et de droit, est pleinement reconnue. Elle est depuis la réforme de la formation en forte croissance, sans parler de l’effet accélérateur de la crise du Covid-19.
- Du point de vue technologique, la F.A.D. est une solution de plus en plus efficiente et diverse : synchrones ou asynchrones, les solutions et formats se multiplient (digital learning, classes virtuelles, e-tutorat, webinar, Mooc, réalité virtuelle ou augmentée, gaming…) les coûts chutent, la couverture du territoire en internet haut débit progresse (y compris en résidentiel) même s’il subsiste des zones blanches.
- Pédagogiquement parlant, elle est mature : les organismes de formation, les éditeurs, les concepteurs s’intéressent enfin à son efficience et à l’expérience utilisateur et pas seulement au contenu de formation, à son ergonomie ou à l’effet Wahou ! Les formateurs s’approprient progressivement les outils du digital et certains sont formés à produire ou co-produire des capsules digitales “simples”.
- Humainement, la F.A.D. suppose un accompagnement renforcé et personnalisé. Même si l’appétences des apprenants pour la modalité distancielle se développe, l’on sait aussi que pour accéder à une réelle montée en compétence à l’issue d’une FAD, il y a une sacré pente , donc nécessité de soutenir les apprenants dans l’effort et la constance !
La FAD, qui s’impose donc aujourd’hui, nous amène à nous ré-interroger sur le niveau d’apprenance des apprenants. L’apprenance, néologisme d’origine québécoise, qualifie la capacité d’un individu à apprendre. C’est à dire son vouloir apprendre – pouvoir apprendre – savoir apprendre.
Nous l’avons défini dans un article précédent et nous avons déjà eu l’occasion de lister pour les formateurs, les 14 questions à se poser sur le « niveau d’apprenance de leurs apprenants » (vous voulez vérifier le niveau d’apprenance de votre public avant de démarrer un parcours de formation, c’est ici)
Aujourd’hui nous nous reposons la question différemment : comment les professionnels de la formation peuvent-ils appréhender la capacité d’apprentissage en F.A.D. de leurs publics ?
16 questions sur l’apprenance en F.A.D.
De par nos propres expériences de FAD (voir l’interview de Sandrine Nogues et Jonathan Pottiez, interview FAD) et celles de nos consultants et formateurs partenaires, l’apprenance en F.A.D peut s’appréhender au travers de 16 questions. La liste n’est probablement pas exhaustive mais elle permet aux commanditaires, concepteurs et animateurs de FAD d’anticiper et de préparer des plans d’actions pour améliorer le niveau d’apprenance de leurs publics.
- Les apprenants ont-t-ils envie d’apprendre à distance ou considèrent-ils la FAD comme une solution par défaut ? Peuvent-ils y prendre un certain « plaisir » ?
- Sont-ils conscients de ce qu’ils vont gagner à apprendre à distance : sur le fond mais aussi en gain de temps (pas de « départ en formation » possibilité de replay, etc.) et praticité : se former de n’importe où, se former depuis chez soi et sur des temps plus courts, se former lorsqu’on le souhaite et autant de fois qu’on le souhaite (en asynchrone) etc. ?
- Savent-ils se fixer des 1ers objectifs personnels d’apprentissages en FAD ou à tout le moins préparer des questions ou réfléchir à leurs besoins avant une FAD ?
- Réussissent-ils à se projeter après une séance de FAD dans un plan d’action ? (pour transformer de nouvelles connaissances en mises en pratiques qui vont elles-mêmes générer une montée en compétences)
- Parviennent-ils à se concentrer, marquer une attention (potentiellement durant plusieurs dizaines de minutes consécutives) lorsqu’ils passent par le média « écran » en FAD ?
- Pratiquent-ils l’écoute active en FAD – Prennent-ils facilement la parole à distance ? Interagissent-ils avec les autres apprenants ou le formateur – tuteur, via les outils collaboratifs mis à distance ?
- Possèdent-ils une aisance minimale dans l’usage du device et du contenu proposé pour/par la FAD (ordinateur, tablette,…) et de ses interfaces (clavier, souris…) ? Naviguent-ils avec aisance dans un MOOC ? Utilisent-ils le chat ou des fonctionnalités telles que le partage de document en classe virtuelle ? Sauront-ils se repérer dans les différents contenus ?
- Disposent-ils de méthodes de prise de notes rapides ou d’outils (comme evernote, slack, etc.) afin d’être actifs, interactifs et collaboratifs pendant/après une FAD et ainsi de mieux mémoriser ?
- Sont-ils conscients qu’en FAD, on pourra les solliciter pour utiliser toute la palette des modes d’apprentissages : les apports de contenu, les échanges, les travaux personnels, la projection dans l’action, etc. ?
- Savent-ils planifier et organiser leurs séquences personnelles d’auto-formation et les travaux de « production », en dehors des moments synchrones ou en sous-groupe ?
- Formalisent-ils des scénarios de passage à la pratique post FAD (ou au moins des hypothèses d’action) et le cas échéant sollicitent-il leur e-tuteur ou e-formateur pour avancer ?
- Consolident-ils leurs apprentissages FAD en pratiquant la répétition : consultation en plusieurs fois des contenus asynchrones, retraitement à froid (après une bonne nuit de sommeil !) de leurs notes prises en formation, reformulation auprès des collègues, etc. ?
- Leur environnement offre-t-il des conditions satisfaisantes pour apprendre à distance ? (bureau, open space, pièce à domicile pour le télétravail…). Peuvent-ils s’isoler de leur collectif habituel ou de leurs proches (télétravail), prendre de la distance pour aussi prendre du recul ? Se créer un “environnement d’apprentissage FAD” ?
- Leur “collectif de travail” est-il promoteur ou détracteur de la FAD ? (collègues, managers, clients, RH, formateur référent…) Les soutient-il avant / pendant / après la FAD ?
- Disposent-ils des moyens autonomes pour apprendre lorsqu’ils sont en dehors de leur site de travail ? Possèdent-ils des outils et les pré requis (connexion internet d’un débit suffisant, ordinateur ou tablette avec software relativement récent, casque audio) pour continuer à apprendre correctement ainsi ? Sont-ils susceptibles à un moment de rencontrer des difficultés d’ordre technique en FAD ?
- Disposent-ils de temps suffisant pour apprendre à distance ? Pour participer sans stress aux séquences synchrones de leurs parcours. Possèdent-ils des heures dédiées « un temps pour soi » ou sanctuarisées pour travailler en asynchrone ?
Comment aborder la FAD avec un public qui n’est pas (encore) convaincu, prêt, préparé ?
Dans un premier temps, il s’agit d’anticiper les éventuels doutes, réserves, craintes des participants afin de les comprendre et de les traiter, le cas échéant, par un effort de communication :
- Ont-ils des a priori sur la FAD ? Lesquels ?
- Craignent-ils de ne pas savoir apprendre en FAD, ne pas être à la hauteur des « autres »
- Appréhendent-ils négativement le contenu, l’outil ou les modalités proposés en FAD ?
- Existent-ils des contraintes ou freins externes à l’utilisation de la FAD ?
- Ont-ils des mauvaises expériences passées en FAD ? Lesquelles et sur quels thèmes / contenus / outils ?
Dans un second temps, la manière la plus habile pour convaincre, repose sur le principe « essayer c’est l’adopter ». Pour inciter à l’utilisation de la FAD, on peut les introduire en… formation présentielle. Le formateur par exemple amène ses participants à consulter ensemble, en sous-groupes, des ressources digitales durant sa journée d’animation. Il peut aussi les faire « jouer » : voter de manière interactive via des outils comme Kahoot ou Wooclap . Il peut également leur faire tester l’outil de classe virtuelle en avant-première et en présenter les fonctionnalités. Il peut enfin les guider pour profiter au mieux de la modalité FAD en leur remettant un guide pratique « apprendre à distance ».
Toutes ces astuces permettent au fond de démythifier la FAD, de rassurer les futurs participants et de répondre à leurs objections.
Si le test en présentiel n’est pas possible, une séance de démonstration et de questions / réponses à distance, via un webinaire introductif au parcours de formation à distance peut être organisée.
Certains formateurs reprochent parfois à la FAD d’être un média froid et de gommer les émotions. Ils peuvent alors recréer du collectif, de la dynamique de groupe et de l’émotion “pendant” et “ailleurs” :
- en FAD synchrone en intercalant des exercices, cas, mises en situation, etc. en sous-groupes pendant une classe virtuelle
- en FAD asynchrone en rassemblant des apprenants après la consultation de contenus et leur faire produire des travaux dirigés ou une réflexivité amont, avant une mise en pratique !
D’autres formateurs redoutent les “usines à gaz” en FAD. Ils peuvent démarrer alors par des solutions FAD simples, robustes, d’une durée limitée et faciles d’accès avant de passer à des outils complexes ou sophistiqués.
Démythifier et vulgariser la FAD, c’est aussi s’occuper des prescripteurs : les managers des apprenants, qui peuvent être “bêta-testeurs” des FAD !
Enfin un effort de “guidance” est nécessaire lorsque les contenus FAD foisonnent : certaines entreprises mettent en place par exemple des concepts de “play-lists” de contenus FAD (sur le modèle des plays-listes musicales). Ou d’autres utilisent des applications à base d’algorithmes qui permettent de “pousser” des contenus en fonction de nos consultations précédentes.
Faut-il désormais ajouter un 4ème verbe au vouloir, pouvoir, savoir apprendre : devoir apprendre à distance ? Même si la crise du Covid-19 introduit, parfois abruptement, la FAD dans les pratiques de formation, elle ne doit pas devenir une obligation pour les apprenants. Comme le rappelle Yann Bonizec dans sa prise de position sur la FAD, toute expérience d’apprentissage, quelle que soit la modalité, doit rester humaine ! cf. son article “Pour une FAD pertinente, efficiente et humaine”
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