Les nombreux acronymes tournant autour de la formation en situation de travail sont loin d’être dénués de sens. Comprendre ce qu’ils signifient peut nous aider à mieux saisir ce qu’est concrètement cette innovation juridico-pédagogique.
FEST pour renforcer la notion de formation formelle
L’expérimentation DGEFP lancée fin 2015 sur les modalités de développement en situation de travail a diffusé largement l’acronyme FEST pour « Formation En Situation de Travail ». A travers cette dénomination, la DGEFP voulait montrer que l’objectif est bien de définir le cadre de la mise en œuvre d’actions éligibles au titre de la formation professionnelle. L’idée était de définir cet OVNI pédagogique qui deviendra l’AFEST comme une modalité de formation au même titre que la formation présentielle ou la formation à distance.
L’AST rapidement balayé…
D’aucuns, se référant explicitement aux courants de la didactique professionnelle ou de la clinique de l’activité auraient préféré le terme d’AST pour « Apprentissage en Situation de Travail ». Le choix du terme “apprentissage” n’est pas anodin ; il invite à sortir du modèle classique de la formation. Mais, c’est aussi laisser à penser qu’il n’y a plus alors ni intention pédagogique, ni encadrement pédagogique. Ce terme faisait référence implicitement à la formation sur le tas et aux apprentissages fortuits. En AST tout peut être occasion de développement. En écartant cet acronyme, les auteurs de l’AFEST ont voulu adresser un signal fort aux opérateurs : toute activité de travail n’est pas forcément apprenante. Pour qu’il y ait apprentissage, il est nécessaire d’organiser un parcours pédagogique alternant des mises en situations et des temps de réflexivité. Faire n’est pas en soi formateur. Gérer des situations professionnelles sélectionnées et aménagées, et porter un regard réflexif sur ce que l’on va faire, ce que l’on fait ou ce que l’on a fait dans ces situations de travail peut l’être.
… comme la PST…
Le terme de PST ou Professionnalisation en Situation de Travail a été proposé dès les débuts de l’expérimentation de la DGEFP notamment par l’expert en droit de la formation Jean-Marie Luttringer faisant référence aux travaux de Guy Le Boterf. Cet acronyme met l’accent sur la capitalisation des expériences vécues et se rapproche davantage d’une logique de VAE que de formation. C’est le parcours des diverses expériences professionnelles qui est valorisé et non pas seulement les formations qui y sont réalisées. L’idée était séduisante mais finalement assez éloignée une nouvelle fois de la formation. Les entreprises ne s’y retrouvaient pas car l’AFEST est avant tout pour elles un moyen d’intégration ou « d’on boarding » comme aiment à le dire les sociétés influencées par les modèles anglo-saxon de management des ressources humaines. Or, lors d’une intégration, la capitalisation de type VAE reste faible et en tous les cas n’est pas le but premier. La priorité est de se former, c’est-à-dire d’acquérir de nouvelles compétences en étant accompagné. Vu le succès au final très limité qu’aura eu la VAE en bientôt 20 ans d’existence, il ne fut pas difficile d’écarter ce troisième acronyme.
… et pour finir AFEST
Au final, après la loi et le décret du 28 décembre, c’est l’acronyme AFEST qui va rester. La loi du 5 septembre 2018 définit la formation en situation de travail comme une des trois modalités de formation possible et le décret n°2018-1341 précise les conditions de mise en œuvre « d’une action de formation en situation de travail ». Le petit monde de la formation ne va retenir que l’acronyme qui peut le résumer : “AFEST”.
Le débat est ainsi clôt. L’AFEST est avant tout une action de formation. Elle est donc formelle et un parcours pédagogique définie au démarrage en est la preuve. Elle bénéficie d’un encadrement pédagogique et doit être évaluée et tracée. Sa seule particularité in fine est d’avoir comme matériau pédagogique les situations de travail et de proposer une nouvelle approche pédagogique : l’analyse réflexive.
L’AFEST, c’est donc bien une action de formation comme une autre, mais à la différence des autres, elles procède d’une analyse du travail en amont et d’analyses réflexive tout au long du parcours.