Dans un précédent volet nous avons abordé les facteurs expliquant pourquoi la plupart des managers d’équipes ont peu contribué à la formation professionnelle et comment y pallier. Dans ce second volet, nous répertorions comment procèdent certaines entreprises pour réellement impliquer leurs lignes hiérarchiques dans la formation des salariés. Découvrons leurs meilleures pratiques.
1. Appliquer le principe de subsidiarité
Mettre en place un principe général de subsidiarité dans le développement des compétences.
Toutes les actions de développement des compétences à la portée des managers doivent dans la mesure du possible, leur être déléguées (ou en tous les cas fortement les y associer).
Il s’agit notamment des formations de perfectionnement individuel des collaborateurs, des formations préparant à des qualifications professionnelles ou encore des formations concourant à la performance individuelle et collective de l’équipe.
A contrario, tout ce qui dépasse leurs moyens, capacités ou leur pouvoir décisionnel doit être pris en charge par l’échelon supérieur (direction) en lien avec le service formation, à savoir : les formations obligatoires et les formations en lien avec la stratégie de l’entreprise.
2. Redonner la main aux managers par les « entretiens de développement »
Un nombre croissant d’entreprises et organisations décident de supprimer l’entretien annuel de performance. Elles ont écouté leurs managers et collaborateurs qui qualifiaient fréquemment cet entretien de “hors sol, administratif, chronophage, lourd, arrivant soit trop tard, soit trop tôt dans l’année ” (sic). Ne parlons pas des entretiens professionnels obligatoires réalisés souvent une fois tous les deux ans.
Les entreprises novatrices promeuvent plutôt la formation permanente, plus exactement une démarche d’amélioration continue des compétences. Cette démarche est appliquée lors d’entretiens managériaux réguliers avec les collaborateurs, qui deviennent alors des rituels. À tous moments, un manager et un collaborateur peuvent ainsi être à l’initiative d’un entretien de développement individuel (qui viendra nourrir d’ailleurs le futur entretien professionnel « formel »). Le SI RH-Formation est adapté en ce sens.
3. Raisonner « métiers » et parler le même langage…
Plutôt que d’imposer aux managers de suivre la logique du développement RH (ingénierie de compétences => ingénierie de formation => ingénierie pédagogique) certaines entreprises incitent plutôt les managers à identifier et partager, en communautés de métiers, des problématiques concrètes de compétences dans leurs « métiers » « activités » ou « missions ». C’est une pratique répandue par exemple dans les secteurs à très forte intensité informatique, comme la production audiovisuelle numérique, où les geeks échangent quasiment en continu (par le biais de chat ou fil de discussion) sur ce type de problématiques.
On pourrait imaginer pousser ces communautés à aller un cran plus loin, c’est-à-dire jusqu’à constituer des plans d’action flash de développement des compétences. Pour cela la communauté pourrait régulièrement inviter en son sein le responsable formation, afin de co- construire une solution appropriée et facilement mobilisable (tutorat/mentorat, AFEST, binôme de compétences, mission apprenante, auto-formation accompagnée en ligne, revue des pairs etc.).
Le langage des responsables de formation vis-à-vis des managers opérationnels est amené à s’ajuster. Le RF ne parle plus tant « tuyauterie formation » que de « compétences ». Ce changement sémantique induit alors chez les managers une autre façon de considérer le sujet : ils se rendent compte que la formation classique (autrement dit : le stage) n’est définitivement pas la seule solution pour développer les compétences ! Du côté du responsable formation, il s’agit concrètement de parler le langage du métier et d’utiliser les tournures “maison”. Le langage de spécialiste RH-Formation enferme le dialogue et la réflexion commune avec les opérationnels, dans une logique d”ingénierie et de “tuyauterie”, alors qu’il faut surtout parler problématiques, enjeux et finalités.
4. Mettre en place des rituels simples et réguliers !
Au sein des entreprises les plus engagées, l’on retrouve des rituels signifiant à tout le corps social que le développement des compétences est aussi l’affaire des managers. On pense bien entendu aux « revues de personnel » auxquelles de nombreux managers adorent participer car on s’y “pose”, on y parle des collaborateurs et pas seulement des chiffres ! D’autres entreprises préfèrent promouvoir les groupes d’échanges de pratiques, les ateliers de co-développement, les AFEST collectives, etc. Quoi qu’il en soit, une des évolutions du rôle de responsable formation en entreprise se dessine ici : davantage animateur que gestionnaire !
5. Sanctuariser un temps d’accompagnement
Allouer du temps aux managers pour accompagner le développement des compétences des équipes, ne suffit pas. Cette « allocation » souvent fictive se heurte en effet aux contingences de production , aux exigences de délivrance des services ou encore à la pression des objectifs opérationnels… sur lesquels sont évalués les managers.
Un de nos clients, grand groupe d’ingénierie est allé plus loin que l’allocation de temps : son Comité de Direction sanctuarise 30 heures par an à ses managers-tuteurs pour accompagner les collaborateurs. Ces heures sanctuarisées sont « taguées » dans l’ERP et viennent ainsi en déduction des heures de production facturables. Par conséquent les Business Unit ne sont pas pénalisées au niveau de leurs objectifs de performance ou comptes de résultat lorsqu’elles investissent du temps dans les compétences et l’accompagnement de leurs ingénieurs et chefs de projet juniors !
6. Former les managers à la communication pédagogique, pour commencer…
Un très grand groupe, avec lequel nous travaillons depuis plusieurs années, propose à ses managers de développer leur posture pédagogique lors des entretiens de suivi opérationnel avec leurs collaborateurs. Selon les cas, le manager apprend l’art de faire passer une critique constructive et bienveillante, à formuler un feed-back motivant, etc. Dans un second temps, le manager apprendra à accompagner la réflexivité de son équipier, par exemple avec le questionnement F.A.S.T. Cette capacité à communiquer pédagogiquement avec ses collaborateurs est une première phase dont le but est d’amener le manager de proximité à penser « compétences » et non plus seulement « performance » et « métier ». La phase suivante consistera à utiliser les méthodes AFEST pour former des « managers d’équipes apprenantes ».
Ecoutons les managers : ils ont tant de choses à nous dire sur les compétences au travail …
Les entreprises sont confrontées dans la décennie 2020 à de multiples défis (stratégiques, technologiques, démographiques, sociétaux…) qui impacteront profondément et durablement les compétences de leurs collaborateurs.
Les acteurs de la formation en entreprises et notamment les responsables formation comprennent la nécessité de déconcentrer et décentraliser le Plan de Développement des Compétences pour le rapprocher des besoins objectifs des collaborateurs et des collectifs de travail. Cela ne peut fonctionner qu’en impliquant les lignes managériales de proximité. L’erreur serait de brusquer les choses et d’imposer une vision Top-Down. La première clé de réussite est donc d’écouter les managers sur ce qu’ils ont à nous dire des compétences de leurs équipes et des problématiques qu’elles rencontrent.
Vous souhaitez entamer votre réflexion stratégique avec un consultant C-Campus ? Par exemple sur comment utiliser l’AFEST et la FAD dans vos travaux prospectifs avec les managers sur le PDC 2022 Contactez-nous ici !