Depuis fin 2016, de nombreux professionnels des RH et de la formation, ainsi que de nombreux opérationnels, ont suivi le cycle certifiant référent AFEST de C-Campus.
Dans la continuité d’interviews déjà réalisées, nous donnons aujourd’hui la parole à Jean-Roch Houllier, certifié en mars 2021, qui nous partage son point de vue sur l’AFEST et son retour d’expérience dans le cadre d’un déploiement à grande échelle : quels sont les projets concernés ? Quelles sont les bonnes pratiques mises en œuvre et quels sont les points de vigilance à avoir à l’esprit ?
Jean-Roch évoque également différents sujets ayant trait à l’innovation pédagogique, et notamment l’AFEST à distance.
Pouvez-vous vous présenter dans un premier temps ?
Après une quinzaine d’années passées dans le domaine de la conduite de projets, programmes et portfolios de télécommunication, j’ai intégré et passé une dizaine d’années au sein de l’université du groupe Thales où j’ai occupé plusieurs fonctions dans le domaine de la formation. Depuis avril 2020, je suis Head of Learning & Digital au sein de Safran University, l’université corporate du groupe Safran. Je suis chargé du pôle de la pédagogie et du digital et suis tout particulièrement impliqué dans le plan de transformation de Safran University. En un peu plus d’un an et dans le contexte de la crise sanitaire, nous avons réalisé une transformation accélérée de Safran University avec de nombreux projets déployés ou en cours de déploiement en France et à l’international.
Pourquoi avoir voulu vous former et vous certifier référent AFEST au vu de votre position à l’Université Safran ?
Afin de déployer le plan de transformation de Safran University, nous avons eu l’idée de formaliser et déployer un plan d’innovations pédagogiques et digitales. Ce plan présente l’avantage de cibler les innovations tant en termes de budget que d’efforts à mettre en œuvre. Plus généralement, il permet de proposer à nos ingénieurs pédagogues et plus largement à nos collègues apprenants et apprenantes une pédagogie innovante et impactante. L’AFEST appartient à ce plan d’innovation et a été retenue par le vaste champ d’opportunités qu’elle offre, plus précisément par sa forte connexion au terrain doublée de sa dimension sociale et d’accompagnement. En résumé, l’AFEST est pour nous une méthode pédagogique d’une grande richesse dont la contribution à nos “voyages d’apprentissage” (c’est ainsi que nous nommons nos parcours multimodaux de nouvelle génération) sera décisive. Elle possède également des dimensions très utiles, selon nous, à l’implication et à la professionnalisation des hommes et des femmes de l’entreprise, transmetteurs de savoirs et accompagnateurs potentiels au sein de nos dispositifs AFEST. Bref, l’AFEST est pour nous un levier très pertinent dans l’émergence et la mise en œuvre de l’entreprise apprenante.
Quels sont les projets de développement de l’AFEST chez Safran ?
Notre approche a consisté dans un premier temps à devenir référents afin de bien comprendre et de maîtriser les concepts, principes et pratiques liés à l’AFEST. Nous avons également pris le temps de faire un panorama de méthodes existantes sur le terrain afin d’assurer une mise en cohérence avec l’AFEST. Cela concerne par exemple les actions de tutorat ou encore le TWI (Training Within Industry) bien développés au sein de l’entreprise. Les discussions sont en cours et permettront de préciser les projets de formation au sein desquels pourrait être intégrée l’AFEST. Nous prévoyons également au travers des connaissances développées d’ajouter cette nouvelle expertise pédagogique à celles proposées par Safran University aux sociétés du groupe qui seraient intéressées par la démarche.
Quelles sont les bonnes pratiques que vous avez pu observer et expérimenter à ce stade ?
En me basant sur mon propre vécu et mon projet de certification, la réalisation d’une AFEST est jalonnée par des étapes utiles selon moi à une bonne formalisation de la démarche. J’ai été marqué par l’importance (un préalable incontournable) d’une bonne analyse du travail et d’une formalisation de l’itinéraire d’apprentissage. Il s’agit là d’un socle essentiel avant tout démarrage de la phase proprement dite d’exécution de son projet d’AFEST. Un document, le dossier de synthèse de pratiques professionnelles, a constitué dans mon cas un “fil rouge” très pertinent et qui m’a permis de travailler progressivement et itérativement ma démarche d’AFEST. Durant la réalisation proprement dite de mon projet, j’ai été impressionné par la dimension réflexive mise en œuvre lors de l’accompagnement de l’apprenant. J’entrevois ici une illustration concrète d’un apprenant impliqué et premier acteur de son développement, le tout contribuant plus généralement à la mise en place d’une posture “réflexive” des salariés de l’entreprise, “au fait” de leurs pratiques professionnelles.
A contrario, quels sont les points de vigilance que vous avez pu relever ?
L’AFEST peut, de toute évidence, décourager au premier abord par le cadre très formel et la documentation qui l’entourent. Il faut donc voir “au-delà” et, selon moi, faire les choses avec simplicité et pragmatisme en mettant toujours en avant le résultat visé et les bénéfices de l’approche. De toute évidence, une pédagogie de la démarche s’impose ! Autre observation, la posture réflexive (qui me fait penser à une forme de coaching, “je m’inscris en miroir de l’autre”) ne s’improvise pas et va demander une préparation préalable des accompagnateurs et accompagnatrices envisagées dans les dispositifs.
Je vous sais très intéressé par le potentiel de l’AFEST à distance. Comment voyez-vous les choses à ce niveau ?
La crise sanitaire a nécessité le déploiement d’un grand nombre de dispositifs de formation “à distance” au travers de dispositifs existants. Avec le recul, on voit que le tout “numérique” ou le tout “distant” ne peut satisfaire et répondre à tous les besoins, à commencer par celui de se voir, de se rencontrer en face-à-face. Cela est pour moi un peu à l’image d’une recette de cuisine où même un ingrédient de grande qualité finirait par lasser nos papilles gustatives ! La clé tient sans aucun doute dans la pluralité des approches pédagogiques. À cet effet, une réflexion d’une composante (parmi d’autres et avec le bon dosage) de l’AFEST me semble pertinente comme on l’a vu se développer ces dernières années dans les domaines du coaching, du mentorat et plus récemment du codéveloppement.
Un dernier conseil à donner aux équipes de formation de grandes entreprises qui souhaiteraient déployer l’AFEST ?
De toute évidence, prendre le temps de bien se former à l’AFEST et d’exécuter une analyse fine du contexte de l’entreprise afin de voir comment cette approche pédagogique pourrait s’y insérer.