La réforme de la formation inquiète les services de formation. Le projet de loi n’est pas encore débattu à l’Assemblée Nationale que déjà un grand nombre de nos clients s’interrogent : “finalement, est-ce une bonne chose cette fin de l’obligation fiscale ?“, “Serons-nous encore là dans deux ans ?“, “interviendrons-nous encore dans l’élaboration du plan de formation si nous n’avons plus de budget ?“ Toutes ces questions sont légitimes et les inquiétudes fondées. Mais il restera toujours de la place pour les services de formation qui apportent une réelle valeur ajoutée.
Valeur ajoutée n°1 : la production de formation
Historiquement, un service de formation “faisait de la formation“. Avant les années 1990 et son rattachement à la DRH, la fonction première d’un service formation était de concevoir et d’animer des stages ou des formations au poste de travail (on the job training, dans les 1960 et 1970). Cette mission s’est perdue avec le développement des politiques Achats et l’arrivée des généralistes RH dans les fonctions formation. On ne formait plus alors, on manageait de la formation. C’est oublier que la première valeur ajoutée d’un service formation, c’est de développer la formation interne. Soit en formant soi-même, soit en animant un réseau de formateurs. La formation interne présente de nombreux avantages : flexibilité, adaptation au besoin, réduction des coûts, capitalisation des savoirs… Ces qualités vont devenir essentielles avec la suppression de l’obligation fiscale. Une fois l’illusion de la gratuité de la formation supprimée (“de toute façon, c’est pris en charge !“), les services formations vont devoir faire la preuve qu’ils rapportent plus qu’ils ne coûtent… sans le filet des co-financements OPCA.
Valeur ajoutée n°2 : la définition des politiques de formation
Une formation n’a de sens que si elle est intégrée dans une politique plus large de développement des compétences. La deuxième valeur ajoutée d’un service de formation est par conséquent d’animer le processus d’élaboration et de suivi de la politique de formation. Il lui revient d’analyser les besoins stratégiques de développement des compétences avec les différentes direction, de rechercher les meilleures solutions pédagogiques pour y répondre et déployer les démarches et outils appropriés. Cette mission de stratège est plus que jamais déterminante à l’heure de la digitalisation de la formation et des changements profonds de métiers que vivent les entreprises. Les services de formation vont devoir élever leur niveau de jeu. Leur interlocuteur n’est plus seulement le manager ou le DRH, mais la direction générale et les directions opérationnelles. Leur valeur ajoutée se situe dans les choix technopédagogiques qu’ils feront pour leurs sociétés et dans leur capacité à comprendre les métiers de leur entreprise, en détecter leur évolution et à proposer les réponses formation les mieux adaptées. Encore une fois, quand le budget n’est plus protégé, on peut soit le défendre en vain, soit le réorienter vers l’essentiel et l’optimiser.
Valeur ajoutée n°3 : l’accompagnement des managers
Ces dernières années, les managers ont eu tendance, à refiler la patate chaude de la formation aux services RH/Formation. “Mon collaborateur ne sait pas faire, il doit y avoir une formation pour ça !“ Et les services formation, forts de leur budget ont pu la financer. Avec la fin de l’obligation fiscale, ce petit jeu va vite s’arrêter. Quand le besoin de formation ne sera pas indispensable, plus question de financements. Le manager va devoir reprendre sa mission pédagogique. A lui d’organiser et d’animer la capitalisation et la transfert de compétences au sein même de ses équipes. Va t-il y parvenir seul ? Le sujet est complexe. Il nécessite de savoir déployer une démarche compétence au sein de ses équipes et de maîtriser de multiple techniques que l’on pourrait qualifier de “formation rapprochée“ : réunion de partage de bonnes pratiques, binôme de compétences, veille sur l’évolution des tendances… Cette expertise pédagogique est l’essence d’un service formation. Encore faut-il l’avoir capitalisé au fil du temps. Ceux qui ont pu sortir la tête de la gestion administrative et ont poursuivi la veille pédagogique créeront de la valeur auprès des managers. Les autres auront beaucoup plus de mal.
Valeur ajoutée n°4 : l’accompagnement des apprenants
Plus que le DIF, le CPF va renforcer l’individualisation de la formation. L’apprenant est l’acteur clé de la réforme de la formation professionnelle. Il lui revient la charge de monter son parcours de formation et de naviguer dans les méandres de la tuyauterie financière de la formation. Le DIF, c’était simple : l’entreprise accepté ou refusé, mais quand elle acceptait, elle finançait tous les frais. Le CPF, c’est une autre paire de manches ! Rien que pour un salarié cinq questions essentielles sont à se poser :
- Ma formation est-elle qualifiante et se trouve t-elle sur une des 3 listes ?
- Ai-je droit à l’abondement correctif ?
- Quelle est la position de mon entreprise : refuse t-elle ma demande ? Est-elle contrainte de l’accepter car ma formation entre dans le cadre d’un accord de branche ou d’entreprise ou elle me permet de développer mon socle commun de compétences ? L’accepte t-elle sur ou hors temps de travail ?
- Qui finance ma formation : mon entreprise ? le Fongecif ? l’OPCA de mon entreprise ?
- Qui est prêt à abonder ma formation ? Puis-je la combiner avec du plan, une période de professionnalisation, du CIF ?
Valeur ajoutée n°5 : la conception de formations certifiantes flexibles
L’ingénierie de formation a toujours été une compétence coeur de métier pour la formation. A la suite de la réforme de 1971, puis de celle de 2004, cette ingénierie a produit essentiellement des catalogues de formation toujours plus volumineux : catalogues de stages, catalogues d’actions Diffables, plus récemment catalogues blended. La réforme de 2014 devrait signer l’arrêt de mort du catalogue. Les co-financements étant réorientés vers la formation qualifiante de durée moyenne (150 heures), les entreprises vont devoir inventer de nouvelles pratiques d’ingénierie centrées sur la conception de parcours certifiants flexibles. Cette ingénierie de dispositif nécessite la maîtrise de compétences à la croisée de la pédagogie et des technopédagogies, de la définition de référentiels de compétences, de l’élaboration de certification et de l’ingénierie financière. Bref, l’ingénierie de parcours certifiants flexibles est une compétence rare que peu de gens peuvent maîtriser en dehors d’un service de formation.