Dans un article précédent, nous avons abordé l’art du questionnement pour créer les conditions d’un engagement dans sa formation et pour faire participer lors d’un exposé – cliquez-ici. Nous vous proposons de traiter dans cet article 4 autres situations de formation où le questionnement peut être une « technique pédagogique » bien utile pour les formateurs et formatrices.
Questionner pour débriefer un exercice, un jeu de rôle, une simulation…
La mise en pratique est une approche pédagogique couramment utilisée en formation. Convaincus, qu’on apprend bien en faisant, les formateurs et formatrices adorent organiser des exercices de mises en pratiques sur plateaux technique, via des casques de réalité virtuelles ou des jeux pédagogiques. Et plus simplement via des simulations ou jeux de rôles reproduisant la réalité du terrain.
Toutes ces situations pédagogiques, potentiellement très pertinentes, ne le sont réellement que lorsque les formateurs amènent les apprenants à analyser ce qu’ils ont fait dans leurs mises en pratique. Faire n’est pas forcément apprendre ! Si on fait et refait toujours le même geste, on aura toujours le même résultat et il n’est pas garanti que l’on progresse. On peut parfois, malheureusement ancrer de mauvais gestes – cf. notre article sur l’erreur en pédagogie. Pour progresser encore faut-il après avoir fait prendre du recul et réfléchir à ce que l’on a fait pour envisager d’autres manières de faire.
C’est ce que nous faisons systématiquement dans le cadre de formations en AFEST où on organise une séquence réflexive systématiquement après les MSP (Mises en Situation Professionnelle).
Le formateur ou la formatrice en formation synchrone (présentielle ou distancielle) peut pratiquer de la même façon. Il lui suffit d’inviter son groupe après la simulation à se poser et répondre aux 4 questions de notre Questionnement FAST®.
- FAITS : Refaites-vous le film dans votre tête, par quelles étapes êtes-vous passé pour réaliser votre exercice ?
- ANALYSE : Qu’est-ce qui a plutôt bien fonctionné ? Moins bien fonctionné ?
- SOLUTION : Et si c’était à refaire, que feriez-vous ? Qu’améliorerez-vous ?
- TRANSFERT : Et globalement, quels enseignements tirez-vous de cet exercice pour votre « job » ?
Pour aller plus loin sur le questionnement FAST et les techniques de réflexivité, nous vous invitons à consulter notre article précédent sur le sujet – cliquez ici.
Vous souhaitez vous former aux techniques de questionnement FAST, n’hésitez pas à vous inscrire à notre formation de Référent AFEST ou à notre formation de tuteurs.
Questionner pour prendre la température du groupe en vue de réguler
Former c’est comme faire un bon plat cuisiner pour des amis. Il ne suffit pas de choisir et suivre à la lettre la bonne recette (en l’occurrence le scénario pédagogique) et d’acheter sur le marché les meilleurs produits (d’être le plus expert et d’avoir le meilleur contenu), il faut encore être capable de surveiller le plat en train de mijoter, rajouter une pince de sel, diminuer un peu le feu, touiller s’y nécessaire…
En formation, cela revient à évaluer en permanence la progression et si besoin à modifier son programme. Bref, à rester à l’écoute du groupe et des apprenants et à réguler.
Pour y parvenir, le formateur ou la formatrice peut utiliser une nouvelle fois le questionnement. Au moins 3 questions différentes peuvent être posées aux apprenants, elles ont chacune leur finalité et sont donc complémentaires :
- Question sur son apprentissage : « Quelle est la météo de votre progression personnelle dans la formation ? elle est plutôt 2 soleils, 1 soleil… ». Vous pouvez vérifier ainsi si tous les participants sont bien inscrits dans une dynamique d’apprentissage et s’ils ont confiance dans leurs capacités à réussir (voir à ce sujet notre article sur le Sentiment d’efficacité personnelle)
- Question sur la dynamique de groupe : « Quelle est votre météo de la progression du groupe : elle est plutôt 2 soleils, 1 soleil… ». Vous pouvez ainsi détecter des tensions ou difficultés au sein du groupe. Est-ce que chacun se sent soutenu par le groupe ou au contraire les participants ont-ils le sentiment que la dynamique de groupe est un frein pour progresser dans leurs apprentissages ?
- Question sur la qualité de la formation : « Quelle est votre météo de la formation : elle est plutôt 2 soleils, 1 soleil… ». C’est une question plus classique qui vous permettra d’apprécier l’opinion qu’ont les apprenants sur votre formation. Et vous pourrez rectifier le tir aisément en modifiant certaines de vos façons de faire quand il est encore temps (par exemple, le matin du 2ème jour pour une formation de deux jours).
Bien qu’elles soient complémentaires, ces questions ne sont pas à utiliser simultanément. Vous pourrez choisir en fonction du contexte de formation et de vos objectifs.
La technique de la météo est une méthode ludique et visuelle pour faire s’exprimer un groupe en formation. Il vous suffit de dessiner sur un tableau blanc (réel ou virtuel) les symboles du temps, par exemple deux nuages – un nuage – un soleil – deux soleils, et de faire se prononcer chaque participant. Pour préserver l’anonymat en présentiel, vous pouvez utiliser des gommettes. Une fois le vote exprimé, il ne vous reste plus qu’à débriefer en invitant le groupe à commenter les résultats.
Questionner pour évaluer les acquis
Dans une approche classique de formation, quand on s’interroge sur les méthodes d’évaluation des acquis, on pense systématiquement comment le formateur va pouvoir contrôler par des quiz ou des mises en situations si les apprenants ont atteint les objectifs pédagogiques. Dans une approche plus ouverte et orientée sur les processus d’apprentissage, on va davantage donner la parole aux apprenants eux-mêmes.
Ce sont les apprenants qui vont faire leur propre autoévaluation. Pour cela, le formateur ou la formatrice peut leur poser 3 questions :
- CONFIRMÉ : « Quelles sont les connaissances que vous avez confirmées grâce à la formation ? »
- APPRIS : « Quelles sont les connaissances nouvelles que vous avez découvertes grâce à la formation ? »
- TRANSFORMÉ : « Qu’est-ce que vous ne ferez plus demain comme avant après cette formation ? »
Evidemment, ce « contrôle » rapide des acquis ne remplace pas une évaluation approfondie des connaissances et compétences. C’est une technique complémentaire qui permet de favoriser l’ancrage et la mémorisation. C’est davantage une évaluation formative qu’une évaluation sommative. Sur les formations de plusieurs jours, il n’est d’ailleurs pas nécessaire d’attendre le dernier jour pour la réaliser, elle peut être utilisée comme un réveil pédagogique au redémarrage chaque matin.
Questionner pour préparer le transfert pédagogique
L’essentiel des apports d’une formation réside dans la capacité d’un apprenant à transférer ce qu’il vient d’apprendre dans son quotidien. Une approche limitée de la notion de transfert pédagogique peut laisser penser qu’il suffit d’interroger l’apprenant sur ce qu’il compte appliquer pour l’aider à réussir son transfert pédagogique.
Mais, l’inviter à penser à ce qu’il va appliquer de retour de formation est primordial mais pas suffisant. Comme nous l’avons montré, dans un livre déjà ancien (« Organiser le suivi de la formation, Editions ESF, 1997), l’efficacité du transfert pédagogique suppose de questionner l’apprenant autour de trois problématiques, dont l’application n’est que la première.
- Qu’est-ce que vous comptez mettre en oeuvre à 3 jours, 3 semaines et 3 mois (“méthode 333”) ?
- Qu’est-ce que vous comptez faire pour capitaliser vos connaissances ? Par exemple, pour résumer ce que vous avez appris, faire de la veille sur le sujet, approfondir vos connaissances par tout autre moyen…
- Que comptez-vous partager avec vos collègues ou votre hiérarchie à l’issue de la formation ? Par exemple, réaliser une présentation de la formation en réunion d’équipe, réaliser soi-même une formation à partir des connaissances acquises, tutorer ou mentorer un collègue en vous aidant des savoir-faire que vous venez de développer…