La négociation paritaire sur la formation professionnelle entre dans sa phase active : les premiers textes et prises de position sont maintenant connues. Ils vont évoluer et s’affiner au cours de la négociation. D’ores et déjà nous nous risquons à faire un pronostic sur la fin de la contribution fiscale de 0,9%.
Vers une “transmutation de l’obligation fiscale en obligation conventionnelle“
C’est quasiment acté : l’obligation fiscale de 0,9% pour les entreprises de plus de 10 salariés devrait disparaître au profit d’une triple obligation conventionnelle :
- 0,2% versés au FONGECIF pour le financement des congés individuels (CIF), pour bilan de compétences (BC) et pour validation des acquis de l’expérience (VAE)
- 0,5% versés aux OPCA de branche ou interprofessionnel pour le financement de la professionnalisation (contrats et périodes de professionnalisation, formation des tuteurs) et autres politiques de branche : abondement alternance, observatoire des métiers et qualifications…
- X % versés au FPSPP pour le financement du Compte Personnel de Formation (CPF)
Cette “transmutation de la qualification fiscale en qualification conventionnelle“ comme l’a qualifié Jean-Marie Luttringer, expert en droit social, devrait entrainer une simplification administrative non négligeable. La notion d’imputabilité des actions de formation va disparaître au profit de règles de prises en charge par les différents financeurs. Les entreprises ne recherchant pas ces prises en charge pourront réaliser des actions de formation comme bon leur semble. La seule contrainte qui leur incombera est d’adapter leurs salariés à leur poste et au maintien dans leur emploi et de respecter les informations, consultations et négociations prévues par la loi et les accords nationaux et de branche relatifs à la formation et à la GPEC.
Un système à 3 étages
Cette fin de l’obligation fiscale, écrite noir sur blanc dans le texte du Medef remis aux partenaires sociaux en vue de la négociation du 23 octobre, risque de faire grincer les dents de nombreux négociateurs. Déjà la CGPME et l’UPA, pourtant dans le camp patronal, ont pris des positions assez divergentes. Elles ne s’opposent pas à la fin de l’obligation mais prônent une mutualisation des fonds nettement plus importantes que celle du Medef. La CGPME souhaite conserver une obligation (conventionnelle) de 0,9% pour les entreprises de moins de 300 salariés. Pour la confédération des petites et moyennes entreprises, cela n’est même pas négociable.
De son côté, l’UPA (Union professionnelle de l’artisanat) vient de réitérer son souhait de voir les fonds mutualisés des grandes entreprises financer les petites entreprises (moins de 50 salariés). Son Président, Jean-Pierre Crouzet, l’a encore confirmé dans une conférence de presse le 22 octobre : “La mutualisation garantit l’accès au plus grand nombre à la formation professionnelle. Nous ne souhaitons pas qu’elle soit remise en cause“
Conclusion, on devrait aboutir à un système à trois étages :
- Une contribution pour les entreprises de moins de 10 salariés sans évolution significative : le texte du 22 octobre du Medef prévoit un minimum de 0,40% au titre du plan pouvant être augmenté par accord de branche ou accord interprofessionnel. Rien n’est précisé concernant la professionnalisation. Aujourd’hui, le montant de la contribution des entreprises de moins de 10, est de 0,55% (0,4% au titre du plan et 0,15% au titre du DIF et de la professionnalisation). A la fin de la négociation, on devrait retomber sur les 0,55%. Difficile de faire évoluer la contribution formation des TPE dans un sens comme dans un autre.
- Une contribution pour les entreprises de moins de 300 salariés qui pourrait rester à 0,9%, en vue de satisfaire la demande de la CGPME. On resterait ainsi à 1,6% au total. Reste à trancher la question des entreprises de 10 à 19 salariés.
- Une contribution pour les entreprises de plus de 300 salariés dont une partie pourrait être réservée aux moins de 50 salariés (ce qui aurait vocation à satisfaire l’UPA.
L’enjeu du montant du versement FPSPP
Le texte du Medef actuel propose un versement obligatoire pour les entreprises de plus de 10 salariés de 0,15% au FPSPP. Ce montant est une annonce de début de négociation. Il est clair qu’au fil des semaines il va augmenter. Pour mémoire, il ne représente guère plus que le montant versé chaque année au FPSPP par les OPCA suite à la réforme de 2009 (10 à 13% du 0,9%). Nous faisons le pari qu’il devrait terminer autour de 0,3% ce qui représenterait le double des versements actuels. Et ce qui permettrait un gain de 0,6% sur l’ensemble des versements FPC des grandes entreprises (0,2% FONGECIF inchangé + 0,5% OPCA inchangé + 0,3% FPSPP contre aujourd’hui 0,9% obligation fiscale plan de formation)
Sauf revirement de dernière minute par un blocage de la négociation, on peut faire le pronostic que l’obligation fiscale va disparaître au profit d’une obligation conventionnelle qui sera fonction de la taille de l’entreprise. Trois niveaux devraient voir le jour : moins de 10, entre 10 et 300 et plus de 300. Reste à connaître, les montants exacts des contributions. Rendez vous mi janvier 2014.
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