Le digital learning est partout. Il fascine ou il effraie. D’aucuns imaginent qu’il va même faire disparaître le formateur. Nous n’en croyons rien. Nous l’avons déjà écrit à plusieurs reprises : ici ou là.
Le digital nous amène simplement à repenser en profondeur le rôle du formateur. Car plus on digitalise, plus on a besoin de relations humaines : d’accompagnement, de feed back, d’interactions et de collaboration en présentiel…
Le nouveau formateur que l’on qualifiait hier de formateur 2.0, 3.0 ou même 4.0 (les modes n’ont pas peur de l’inflation !), ne sera finalement pas si Geek que cela. Les technologies devenant chaque jour de plus en plus accessibles et conviviales, les compétences du “nouveau formateur” seront avant tout pédagogiques et comportementales.
Revue en détail des 4 compétences clés du “formateur à l’ère digitale” (à ne pas confondre avec le “formateur digital” !) :
Capacité à bâtir des parcours personnalisés en fonction des besoins
A l’ère digitale, la conception pédagogique est totalement revisitée. Hier confiée aux seuls concepteurs de formation, aujourd’hui elle est partagée entre ce dernier et le formateur. Le concepteur réalise les bibliothèques de base de contenus digitaux à diffuser et le formateur détermine avec chacun de ses apprenants les ressources et activités d’apprentissage les mieux adaptées à leur profil.
La nouvelle compétence à maîtriser pour le formateur est alors de comprendre finement le besoin de formation de chacun de ses apprenants et de maîtriser parfaitement l’architecture de la bibliothèque de contenus à sa disposition. Il est en quelque sorte un bibliothécaire ou un documentaliste des temps modernes.
Capacité à trouver et/ou scénariser et/ou produire des ressources digitales à la demande
Quand il ne trouve pas dans la bibliothèque les ressources digitales nécessaires, le formateur les recherche sur la toile, les scénarise et confie la médiatisation à une société de production, ou encore les réalise lui-même en autonomie.
A l’inverse de ce que l’on pouvait imaginer il y a quelques années, le nouveau formateur, n’est pas un expert du digital Learning. Cela ne sert à rien de le former à savoir réaliser des modules de E-Learning sophistiqués. Il n’en a ni le temps, ni le besoin. Mais il doit être formé à :
- Faire de la curation sur internet pour trouver des ressources libres de droits (et il y en a beaucoup, ce blog en fait partie),
- Scénariser des modules de e-learning simples et de courte durée pouvant être utilisés en amont ou en aval de sessions présentielles. Il peut lui-même ensuite médiatiser la ressource en enregistrant les voix off et en faisant des animations simples sur des logiciels de Rapid E-Learning tels que Articulate Presenter voire tout simplement via PowerPoint ou KeyNote.
- Réaliser des vidéos “Face Cam'” ou “Tuto” à partir de modèles fournis par les équipes de conception. Il peut se filmer lui-même ou filmer le geste professionnel qu’il souhaite enseigner et ensuite utiliser des logiciels de montage simples du marché (I Movie ou Quik) pour les post-produire. Pour les “Tutos de logiciel”, il pourra utiliser des logiciels tels que Adobe Captivate. Pour ce faire, il sera nécessaire de le former à la fois à l’utilisation de ces logiciels et à savoir faire des voix off et prendre la parole face à la caméra. Eventuellement à filmer lui-même.
Capacité à mettre en action et à faire vivre des émotions lors de présentiels réellement “événementiels”
Le digital challenge le présentiel. Les pédagogies transmissives ne répondent plus aux attentes des nouveaux apprenants qu’ils soient jeunes ou plus âgés. Le formateur de l’ère digital doit passer à des pédagogies co-actives qui font travailler en permanence les apprenants entre eux au cours des sessions présentielles. On est plus proche du Barcamp, du Hackathon ou de l’entraînement sportif que du cours magistral et même du TP individuel.
Le nouveau formateur doit par conséquent maîtriser toutes ces nouvelles techniques pédagogiques, mais ce n’est pas tout. Il doit aussi pouvoir animer des groupes de toutes tailles et non plus seulement des groupes de 10/12 apprenants. Il doit être aussi à l’aise dans l’animation et l’accompagnement de tous petits groupes (2, 3 ou 4 personnes) que dans celle de très grands groupes 30 à 80, voire 100 et plus.
La taille du groupe fait évoluer considérablement sa dynamique et les rôles et missions du formateur. Un groupe de 10/12 personnes exige des compétences classiques d’animateur de groupe, celui de 2 à 5 personnes plutôt de coach, celui de 30 et plus des compétences de conférencier et d’animateur de séminaire.
Bien entendu, le formateur peut s’aider de solutions digitales d’animation, notamment pour des groupes de grande taille (30 et plus). Qu’il s’agisse de Klaxoon, Kahoot ou Magency, cela ne nécessite pas d’être Geek pour les utiliser de façon pertinente. Une prise en main accompagnée de quelques heures suffit pour savoir en tirer tout leur potentiel.
Capacité à accompagner des personnes et des collectifs dans la durée
La formation à l’ère digitale est avant tout multimodale. Elle mixe ateliers présentiels, parcours d’auto formation à distance (FOAD) et formation en situation de travail (FEST) sur des durées qui peuvent être relativement longues. De quelques semaines pour des parcours d’intégration à plusieurs mois pour des formations certifiantes flexibles.
Sans accompagnement personnalisé, il n’est pas possible de maintenir l’engagement de l’apprenant tout au long du parcours. La ludopédagogie n’est pas suffisante en la matière, il est indispensable d’avoir un coach en apprentissage, comme on peut avoir un coach sportif quand on se remet au sport.
Le nouveau formateur est invité à jouer ce rôle de coach en apprentissage. Il doit développer des compétences d’accompagnement, d’empathie et de bienveillance, d’évaluation et de feed back constructifs mais aussi de suivi et de relance en cas de moindre motivation.
Cet accompagnement peut-être individuel et en présence, tel qu’il est réalisé en tutorat, ou à distance, en E-Tutorat. Il peut être / doit être mis en oeuvre également en collectif via des réunions de suivi et de partage de pratiques ou via l’animation de communautés d’apprentissage. Là aussi, la maîtrise de logiciels de suivi et de solutions de réseaux sociaux sont nécessaires. Mais il ne s’agit pas encore une fois d’expertise digitale à proprement parler, seulement d’une maîtrise d’outils qui entrent dans le quotidien du formateur.