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Réforme des retraites et de la formation : c’est lié !

La réforme des retraites et celle de la formation semblent être envisagée par le gouvernement comme deux réformes parallèles. Pourtant, elles sont plus liées qu’il n’y paraît. Et la formation pourrait être une solution, parmi d’autres, au problème quasi insoluble des retraites.

Retraite : problème insoluble, équation simple

L’augmentation de l’espérance de vie met à mal le ratio de base de tout système par répartition : davantage de retraites à verser pour autant de revenus.

Pour régler la question du numérateur (le versement des retraites), il existe deux solutions principales :

  1. Réduire la période de versement en allongeant la durée de vie professionnelle, soit en fixant un nombre d’années de cotisation plus important (42 -> 44 ans) soit en déterminant un âge minimum de départ à la retraite retardé (62 ans -> 65 ans, voir 67 ans comme dans certains pays de l’Europe du Nord.
  2. Réduire le montant des retraites par une désindexation par rapport à l’inflation ou des conditions de calcul plus exigeantes (passer des 6 derniers mois pour les fonctionnaires à X meilleures années comme dans le privé)

Problème : cela demande des efforts considérables et les opinions publiques y sont hostiles. La solution du dénominateur paraît plus acceptable. Mais comment augmenter le niveau des revenus des systèmes par répartition ? Là aussi deux solutions sont bien connues, mais sont loin de faire l’unanimité :

  1. Créer un nouvel impôt pour financer les retraites : cela a été fait plus d’une fois dans le passé (passage de la tranche de 40 à 41%, augmentation ou élargissement de l’assiette de la CSG…), mais cette approche a ses limites : c’est un frein à la “compétitivité coût“
  2. Augmenter des charges sociales patronales et/ou salariales : la solution est à la fois très impopulaire (baisse de pouvoir d’achats) et économiquement risquée (à nouveau problème de “compétitivité coût“)

Reste un dernier levier, optimiser la performance des cotisations retraites dans le cadre des conditions existantes. Et pour ce faire, il y a deux leviers :

  • Le premier est de faire travailler plus de monde. L’idée est évidente : avec moins de chômage, on a moins de problème de retraites, car les rentrées de cotisation sont plus importantes. C’est la position défendue par les organisations syndicales.
  • L’autre solution est de faire travailler mieux en augmentant le niveau des qualifications. Et par conséquent les rémunérations et donc le montant des rentrées de cotisation. Ce qui, par ailleurs, aurait un effet bénéfique sur la “compétitivité hors coût“ (des salariés plus qualifiés, c’est potentiellement des produits plus haut de gamme et des créateurs ou repreneurs d’entreprise plus nombreux).

Ces deux solutions sont indolores : tout le monde est d’accord pour réduire le chômage et augmenter le niveau des rémunérations. Reste à savoir comment. Et c’est là que la formation entre en jeu. Dans les deux cas, elle peut être une solution. C’est un moyen pour accélérer le retour à l’emploi si, comme nous l’avons déjà évoqué dans ce blog, elle est employée à bon escient. Elle est surtout un formidable outil pour accroître le niveau de qualification.

Malheureusement, depuis la loi de 1971, la formation a surtout été utilisée pour de l’adaptation marginale à l’emploi plutôt que pour de l’accroissement des qualifications et de la promotion sociale. Au moment où on cherche à définir les critères du CPF, il serait bon d’avoir à l’esprit que de mobiliser ce nouveau dispositif uniquement sur les jeunes sans qualification et les demandeurs d’emploi ne règlera pas tous les problèmes. En faire un levier d’amélioration du niveau des qualifications et de promotion sociale est au moins aussi important. Et peut être parfaitement consensuel.

Les priorités du CPF

Pour conclure, voici résumés les trois axes prioritaires que pourrait avoir le CPF.

Le CPF peut d’abord être une seconde chance pour les jeunes sortis de l’école sans qualification. Cette priorité est déjà fixée dans la loi de sécurisation de l’emploi. Reste à la financer. Et c’est là tout le problème. Est-ce aux entreprises de jouer cette mission de rattrapage ou plutôt à l’Education Nationale ? Après tout, c’est peut être à cette dernière de corriger ses erreurs et de prendre en charge la formation professionnelle des jeunes qu’elle n’a pas su préparer à la vie active.
Dans un contexte de chômage élevé, il est évident que le CPF doit avoir comme priorité l’accompagnement des chômeurs vers l’emploi. Mais attention à ne pas déshabiller Paul pour habiller Pierre. Cette priorité fixée, elle aussi dans le cadre de la loi de sécurisation de l’emploi, ne doit pas devenir exclusive et engloutir tous les moyens destinés à la formation des salariés.
Cette troisième priorité est en filigrane dans les textes actuels. Il ne faudrait pas qu’elle se résume à l’accès à la formation diplômante. Car le diplôme n’est pas la qualification et encore moins la promotion. Les négociateurs et le Législateur devraient s’inspirer des lois Debré des années 1950 sur la promotion sociale du travail et plus récemment de la loi de 2004 sur les périodes et contrats de professionnalisation qui proposaient une approche innovante de la formation qualifiante.

Pour aller plus loin…

Les allemands y pensent déjà comme en témoigne un récent rapport sur le problème dramatique des retraites en Allemagne (Ouf ! il n’y a pas que nous)

Article de La tribune commentant un rapport de la fondation Bertelsmann – cliquez ici

 

Marc Dennery

Marc Dennery

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