Tout tuteur, formateur ou accompagnateur AFEST sera immanquablement confronté à une phase bien particulière dans le parcours de son apprenant(e) : celle où il est temps de le/la rendre autonome et de lui signifier qu’on ne peut plus lui apprendre grand-chose…
Ce passage est souvent un peu délicat :
- Pour le pédagogue, qui doit se rendre « dispensable » et savoir « lâcher prise ».
- Pour la personne qui apprend, qui va désormais développer ses compétences par elle-même.
Dans ce premier article, nous allons aborder 3 grands principes pour rendre ses apprenants autonomes. Bien entendu, tout cela ne doit engendrer ni frustrations, ni sentiment d’abandon chez ses apprenants. Au contraire, ces principes d’autonomisation doivent plutôt générer un « sentiment d’efficacité personnelle » chez eux. (Notre article sur ce concept issu des travaux d’Albert Bandura)
Dans un autre article nous donnons 9 exemples concrets illustrant ces 3 principes.
Principe n°1 : Faire face aux demandes d’aide
Rendre autonome, c’est d’abord cesser d’aider, d’apporter des solutions, pire de “faire à la place” de l’apprenant(e). Pour aborder cette première étape (la plus délicate) de l’autonomisation, le tuteur, formateur ou accompagnateur (nous utiliserons dans la suite de l’article le terme générique “pédagogue”) doit analyser correctement la nature de la demande d’aide. En fait, 4 causes différentes sont fréquentes chez nos apprenants. Et la réponse pédagogique sera différente selon la cause de la demande d’aide.
Raison n°1 : L’apprenant(e) est stressé(e) par l’enjeu de la tâche ou de la mission
La demande d’aide au pédagogue va se manifester souvent par des signaux faibles, tels qu’un manque d’engagement, ou une tendance à la procrastination. Parfois le signal est plus fort : refus de passage à l’action, blocage en cours d’action, etc.
La bonne réaction du pédagogue sera :
- Enlever toute pression d’enjeu ou de résultats.
- Au contraire, évoquer les sources potentielles de satisfaction ou gratification, dès lors que l’apprenant procède avec professionnalisme et méthode.
- Utiliser la méthode réflexive amont “RIEC” modélisée par C-Campus, pour définitivement atténuer le stress.
- Les approches ludo-pédagogiques ou les challenges d’équipe peuvent également limiter le stress chez certains apprenants.
Raison n°2 : L’apprenant(e) n’est toujours pas au niveau sur certaines tâches…
En demandant de l’aide, l’apprenant(e) se défausse en quelque sorte, en considérant que durablement cette tâche sera son point faible ! Le hic dans le monde professionnel est qu’on ne peut pas toujours « trainer » des lacunes et faiblesses…
En ce cas, la réponse du pédagogue sera d’accompagner par une activité pédagogique mais sans se substituer à l’apprenant dans l’exécution de la tâche. Par exemple en repassant par une phase de supervision ou un « côte à côte » ou encore par une explication pédagogique de courte durée.
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Raison n°3 : l’apprenant(e) manque de confiance en lui/elle !
Un grand classique… Les doutes ou le manque de confiance en soi sont anciens et plus profonds qu’il n’y parait, chez certains apprenants. Ils sont nés parfois de ce que leur ont dit, maladroitement, leurs parents dans la petite enfance, des remarques blessantes de certains enseignants, des attitudes abusives et culpabilisantes de “petits chefs”, en début de carrière, etc.
Ils finissent dans certaines conditions par “façonner” un trait de personnalité chez certaines personnes.
Quoi qu’il en soit et sans aller dans la psychologie de l’individu, en formation professionnelle, il faudra compenser par des manifestations de confiance, des encouragements, la bienveillance des pédagogues dans les activités pédagogiques.
- Appuyer ou insister sur les points forts avérés de la personne, les lui rappeler factuellement si besoin, la rassurer sur le fait qu’elle va y arriver.
- Alerter sur les pièges de l’excès de perfectionnisme : manque d’opérationnalité, risques de retards, sur-qualité, etc.
- L’accompagnement peut par exemple prendre la forme pédagogique d’un « doublon » ou la constitution d’un binôme de compétences (deux apprenants s’entraidant).
Raison n°4 : l’apprenant(e) a tendance à se reposer un peu trop sur les autres…
Ne pas savoir : c’est reposant quand les autres savent… Sauf que ce comportement finit par agacer tout le monde car la demande d’aide peut être perçue comme une tentative de « délégation-poubelle » !
Le pédagogue réagira par exemple de la manière suivante :
- en refixant un objectif d’apprentissage SMART à son apprenant(e),
- puis lui proposera une mise en situation,
- et une séquence réflexive aval (du type Méthode FAST de C-Campus).
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Principe n°2 : Responsabiliser au-delà de l’exécution de tâches
Le deuxième principe d’autonomisation des apprenants passe par la responsabilisation. En effet, devenir autonome, ce n’est pas seulement exécuter et reproduire des tâches. C’est aussi s’adapter à des changements dans son contexte, analyser des difficultés, prendre des décisions, etc.
Les pédagogues vont concrètement proposer à leurs apprenant(e)s proches de l’autonomie, des situations, voire même des missions « apprenantes ».
9 exemples de situations / missions apprenantes
- Remplacer son tuteur pendant ses absences (congés, déplacements, réunions, etc.),
- Intervenir en réunion d’équipe : présenter une veille, un benchmarking, etc.
- Mener une étude prospective pour le service,
- Tester de nouvelles façons de faire,
- Rechercher de nouveaux fournisseurs ou partenaires,
- Réaliser une cartographie du processus de travail,
- Faire évoluer la documentation technique, l’intranet, la base documentaire, etc., du service,
- Analyser une difficulté récurrente ou un incident majeur et en rechercher les causes,
- Être responsable de la tenue des stocks d’une boutique,
etc.
Cette liste n’est pas exhaustive, il existe d’autres manières de responsabiliser un(e) apprenant(e) et d’ainsi l’amener à développer ses capacités et de lui faire aussi comprendre qu’il devient « un collègue comme un autre »…
Principe n°3 : Amener à apprendre de ses expériences
Le 3ème principe pour rendre autonome, capitaliser et apprendre de ses expériences pour un apprenant, passe par deux étapes :
- primo les conscientiser : en se les remémorant et en les reformulant, façon “on refait le match !”
- secundo en retirer des apprentissages et enseignements par un processus réflexif.
Les pédagogues doivent posséder des méthodes et approches variées pour favoriser la capitalisation chez les apprenants.
Les méthodes pour accompagner prises de recul et réflexivité individuelle
Ces méthodes sont notamment abordées dans nos formations certifiantes “référent AFEST”
- Dispositifs de positionnement et d’accompagnement personnalisé,
- Accompagnement à la réflexivité amont : notre méthode RIEC (déjà citée plus haut),
- Accompagnement à la réflexivité aval : notre méthode FAST (idem),
- Procédés favorisant l’auto-évaluation,
- Méthode de “l’instruction au sosie”,
- Analyse d’incident,
etc.
Les méthodes réflexives collectives ou en équipes
La réflexivité peut également être animée avec plusieurs apprenants en même temps, via des approches collectives variées, à sélectionner selon les contextes, les publics concernés et la culture de l’entreprise. Nous en avons exploré près d’une vingtaine dans ces deux articles : Partie I et Partie II
Les apprentissages entre pairs
Les différentes formes de rétro-actions et d’échanges entre pairs, le partage des succès (et des enseignements des échecs…), l’encouragement à la réflexion critique (et constructive), tout cela participe à la capitalisation “ensemble” des expériences et des apprentissages. Relire ici notre dialogue avec une spécialiste de la pairagogie